Ingenuity n’a évidemment pas qu’un seul objectif. Sur Mars, la Nasa est sur un terrain inconnu. Des essais au sol à la conception de l’engin et du design des pales au comportement attendu d’Ingenuity, de nombreuses inconnues devront être levées par son retour d’expérience.
Après des essais satisfaisants du rotor et des pales, la NASA a donné son feu vert au premier vol martien d’Ingenuity. Si tout se déroule comme prévu, il devrait décoller du cratère Jezero le 14 avril pour un vol autonome de 30 secondes au maximum.
La principale difficulté qui attend Ingenuity sera de « décoller et s’élever dans les airs martiens » en raison de la très « faible masse volumique de l’atmosphère ». À cela s’ajoute que la pression et la densité de l’atmosphère martienne sont d’environ le « centième de celles qui règnent sur Terre au niveau de la mer ou encore celles que l’on connaît à une altitude d’une trentaine de kilomètres, dans la stratosphère, où l’air est plutôt rare ». Pour décoller et compte tenu de ces contraintes, Ingenuity devra éjecter une « quantité de mouvement (produit de la masse par la vitesse) suffisamment élevée vers le sol pour compenser la force de gravité qui va l’attirer vers le bas ».
Optimisation pour les conditions atmosphériques martiennes
Techniquement, le gros challenge pour Ingenuity est donc « d’envoyer beaucoup de masse vers le sol ». Pour cela, il faut envoyer le peu de matière qu’il y a dans l’air martien le plus rapidement possible avec une vitesse de rotation très importante. Sur Ingenuity, elle est comprise entre 2.400 et 2.900 tours par minute, soit « 10 fois celle des pales d’un hélicoptère sur Terre ». « C’est ce qui va provoquer la force propulsive et l’élévation de l’appareil. »
Mais cette vitesse nécessaire a « un énorme inconvénient ». En bout de pales, elle « atteint rapidement la vitesse du son » ! Certes, c’est un phénomène connu et parfaitement maîtrisé sur Terre mais sur Mars, la NASA est « confrontée à un domaine de l’aérodynamique inédit et quasiment inexploré à ce jour avec un rotor et des pales aussi petites ». Sur Mars, cette vitesse du son est de 238 mètres par seconde, plus faible que sur Terre, mesurée à 340 mètres par seconde. À un moment donné du vol, Ingenuity sera confronté à des « phénomènes transsoniques qui sont des phénomènes aérodynamiques générés au passage du mur du son ». Concrètement, il y a une « sorte de mur du son qui se produit en bout de pale, ce qui freine le rotor ».
Pour s’affranchir de cette contrainte, la NASA a optimisé la géométrie et le design des « deux rotors bi-pales coaxiaux d’Ingenuity de façon à ne pas trop augmenter la vitesse de rotation en les vrillant ». Cela explique la forme de libellule des pales, vue de dessus. Notez que ce n’est pas un hasard si Ingenuity est comparé à une libellule. Cet insecte est en mesure de planer dans les gammes du nombre de Reynolds des écoulements rencontrées auxquelles sera confronté Ingenuity. Cependant, tout comme les conditions de vol rencontrées par un drone martien étant inconnues sur Terre, les « géométries permettant de maximiser les performances aérodynamiques en conditions martiennes sont également peu connues ».
Le ou les vols que réalisera Ingenuity serviront aussi à améliorer les « modèles utilisés pour la conception de ce type de véhicules aériens adaptés aux conditions atmosphériques propres à Mars ». Il faut aussi savoir que les essais réalisés au sol sont limités aux capacités des moyens d’essais recréant les conditions martiennes. Le JPL a dû pour cela réaliser une chambre reproduisant l’atmosphère martienne et un système de câbles pour simuler la gravité martienne.
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